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25/09/2012

Intériorité

homme contrejour.jpgLa recherche de la transparence est-elle une quête de vérité ? (Stéphane Marcireau)

Le modèle jusqu’ici prégnant dans l’esprit scientifique semble être celui de la machine ou de l’automate, dont les mouvements sont prévisibles dès lors que l’on en connaît le mécanisme. Cette approche fait écho à Descartes et sa théorie des animaux-machines selon laquelle tous les êtres vivants seraient composés de tuyaux et de ressorts, minuscules, dont le mécanisme s’apparenterait à celui d’une « machine ingénieuse »... A l’image de ces ordinateurs transparents dont on découvre les circuits et l’ossature, la machine possède un fonctionnement que l’oeil du spécialiste connaît et anticipe : une formule d’auguste Comte révèle bien cette conception moderne lorsqu’il déclare « science d’où prévoyance, prévoyance d’où action ».
Si la recherche de transparence semble logiquement s’apparenter à la quête de vérité menée par une certaine forme d’esprit scientifique, pouvons-nous cependant accepter l’extension de cette recherche à l’être humain ?

L’enjeu de la transparence

L’enjeu est de taille puisqu’il s’agit de préserver une spécificité humaine où l’homme posséderait un for intérieur, une singularité imperméable à toute emprise extérieure, imprévisible aux yeux de tout expert. Soyons plus précis encore : plutôt que de parler d’esprit scientifique, évoquons un « esprit de système » qui chercherait à tout saisir, à tout organiser selon l’idée que « tout ce qui est rationnel est réel » et que « tout ce qui est réel est rationnel ». Hegel incarnerait ici l’effort de rationalisation du monde dans une quête de vérité et de transparence.
Il est difficile d’aller à contre-courant de ce grand philosophe sans sombrer dans l’irrationalisme, l’intégrisme religieux ou le mysticisme. Pourtant, pour qui veut résister et ne pas être considéré comme un rat de laboratoire dont on pourrait étudier le comportement, comme l’illustrait brillamment l’émission « Loft Story », il faut restaurer l’idée d’humanité, de singularité personnelle. Il faut ressusciter l’intériorité.

Il faut ressusciter l’intériorité

L’intériorité, telle la pudeur, se révèle comme une résistance, un choix de ne pas se livrer. Ainsi cette discrétion, cette rétention, constituent comme une caisse de résonance qui permet à l’individu de vibrer à lui-même et au monde.
La vérité d’un être résiderait alors dans un certain hermétisme à autrui, en vue d’un épanouissement intérieur. D’ailleurs, la religion qui appelle à fermer la porte pour prier Dieu en son coeur n’invite-t-elle pas au déploiement de l’intériorité et au surgissement de l’individu ?

Ruche ou société humaine ?

Par conséquent, une société ou un monde qui voudraient tout exposer et saisir le fonctionnement de chacun de leurs représentants, s'apparenteraient à une ruche ou une fourmilière dans lesquelles aucun élément individualiste et rebelle n’apparaîtrait. D’ailleurs un comportement et une consommation universels ne sont peut-être possible que dans le cadre de cette disparition de la singularité et de l’intériorité.

En conclusion

Pour finir, rappelons qu’il ne s’agit absolument pas de dénigrer l’esprit scientifique, et encore moins les sciences humaines (sociologie, psychologie...) ou les sciences de la nature (biologie...). Il s’agit pour nous de conserver une spécificité à l’être humain. Or celle-ci se gagne ou se perd : l’homme n’est pas donné d’avance, il se construit et s’édifie.
Ainsi, celui qui n’a pas su perdre de son temps, qui n’a pas gardé un jour, jalousement, une pensée secrète ou qui n’a jamais éprouvé la solitude, celui-ci n’a pas encore commencé à gravir la montagne de l’intériorité. Une montagne où peuvent résonner d’autres appels, d’autres échos. Peut-être est-ce dans ces hauteurs (et dans ces profondeurs !) que résonne la foi ?

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