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25/01/2017

Sous l'aile du jour

gbaudry.jpgVoici une voix(/e) « basse » et pourtant si haute, qui libère une autre cène que la scène des devants médiatiques. Moine poète, Gilles Baudry vit au bout du monde, à l’extrême pointe du monde, à son avant (avent), dans l’abbaye bénédictine de Landévennec, là où finissent les terres d’Occident, celles de la religion du soir et de la résurrection : « Ne devrions-nous pas marcher / Comme si la mort / Était derrière nous ? » Sous l’aile du jour rassemble près d’une cinquantaine de poèmes méditatifs écrits sur la pointe de l’âme et des pieds, dans l’ombre clandestine de la contemplation. Ici, l’écriture n’est point divertissement, mais au contraire perpétuelle conversion du regard contre toute acédie. Celui qui oriente le pèlerin d’Emmaüs de l’absolu n’est pas un Être éthéré volant dans les hautes sphères, mais ce Dieu minuscule au pied du plus humble au point d’en paraître invisible. Ici, les mots sont une ascèse, un exercice d’assouplissement spirituel pour passer sous la porte la plus basse : « Sortir de soi / par la porte des humbles. » La parole est le partage d’une sorte de cène intime et universelle. Tous les êtres (« artistes » ou non) y sont conviés. Tous en sont les bergers et les rois mages. Ainsi, le moine glisse-t-il ses pages bien aérées, bruissant légèrement au creux de l’oreille intérieure, comme des prières de remerciement, à ceux qui l’ont inspiré, qui ont redonné souffle à la Parole de résurrection – humaine lumière de Pierre Bonnard, rayonnement humble de Giorgio Morandi, bleu profond d’Alfred Manessier, dru dépouillement d’Alberto Giacometti, mais aussi bien ce merle aperçu dans le blanc de la neige, la lueur d’une larme ou ce parfum de paradis traversant un visage aimé à tel point que les anges semblent soudain jaloux, comme L’ange oublieux de Paul Klee : « Se demandant s’il doit / Ou non réduire l’envergure de ses ailes / Depuis que ce n’est plus en lui / Mais en nous-mêmes / Qu’un horizon se donne en héritage. »

Yves Leclair
 
 
Je ferai une note de lecture personnelle sur ce nouveau recueil de Gilles Baudry.

00:00 Publié dans Livres, Poèmes | Lien permanent | Commentaires (2)

Commentaires

Un grand poète qui, avec simplicité, va à l'essentiel. Je relis en ce moment "Demeure le veilleur" dont chaque poème est une prière.

Écrit par : Simone | 25/01/2017

Je connais aussi "Demeure le veilleur" paru chez Ad Solem. D'ailleurs je connais tous les recueils de G. Baudry que j'ai plaisir à lire et relire, à méditer aussi. C'est vrai que la frontière entre poème et prière est à peine perceptible. Gilles Baudry est mon maître en poésie.

Écrit par : thierry | 25/01/2017

Les commentaires sont fermés.