24/11/2018
Qu'as-tu donc fait?
Commentaire de l'Evangile du jour (Jn 18,33b-37) par le P. Bernard Podvin. Source.
Habituellement, le prévenu s’évertue, sinon à s’auto-justifier, du moins à adopter une attitude de défense. Or, ici Jésus répond de façon laconique : « C’est toi qui dis que je suis roi. » Le dialogue entre Pilate et Jésus, proclamé en notre messe dominicale, dépasse infiniment une simple analyse de prétoire. Son relief est tout autre. En effet, si les quatre évangiles sont globalement concordants sur la teneur du procès imputé à Jésus, Jean est le seul à relater cet entretien hautement significatif. Comme dit Benoît XVI, il s’agit ni plus ni moins de « sonder en toute sa profondeur la question de la royauté de Jésus, le motif de sa mort, la clé d’interprétation de la Passion ». Il nous est bon d’achever l’année liturgique en contemplant Jésus dont la royauté n’est pas d’ici ! Nous voudrions tant avoir le dernier mot qui parachève le dessein des hommes. Notre tentation serait si grande de donner réduction mondaine à la destinée du Christ. Laissons l’évangile nous rejoindre de l’intérieur : Pilate n’aura rien de tangible à retenir contre l’homme nommé Jésus. Le motif invoqué par les grands prêtres de le lui avoir livré ne devrait objectivement pas suffire à en faire un malfaiteur. Or, le Fils de l’Homme sera crucifié en malfaiteur.
La dérobade politicienne de Pilate est affligeante, tant le mystère du Christ échappe à son discernement. Les détracteurs de Jésus semblent vainqueurs. Nul n’a perçu que la Royauté du Christ est un Amour livré jusqu’au bout. Seuls, au pied de la Croix seront sa mère, Jean et quelques-uns. Le témoignage du Nazaréen est habité de la divine Présence envers l’humanité. Il condense de façon lumineuse ce que l’Épitre aux Hébreux nomme : « Jésus exaucé à cause de son Amour de Fils ». Sa Royauté est d’aimer comme il plaît au Père. Afin que tous les hommes reçoivent la profondeur d’un salut dépassant toutes nos catégories mentales.
C’est une conversion de nos pensées et de nos actes qui est sollicitée en ce millénaire où les enjeux de pouvoir et de décision sont infiniment cruciaux. Pas plus que Pilate, nul n’aura prise sur Jésus. Peut-on faire procès à l’Amour, sinon… de lui faire procès d’aimer ? Il nous revient d’être témoins de la royauté christique. À la fois pleinement donnée au devenir des hommes, et refusant toute récupération mondaine. Chaque jour que Dieu fait nous situe sur cette ligne de crête du disciple et du missionnaire. Dans le plus infime moment de fraternité, comme dans des choix planétaires, la Royauté de Jésus aimantera-t-elle nos décisions ?
Dire que le Christ est Roi ne doit pas consister en sacraliser nos vues mais celles qui lui tiennent à cœur ! Et nous offrir joyeusement au service de cet amour. Une humble personne vient de m’édifier par son témoignage évangélique. Concernant le débat sur la fin de vie, elle est présence à celui qui s’en va sur l’autre rive. Elle dépouille ce moment ultime de tout acharnement vain. Elle refuse catégoriquement toute main mise sur l’heure que nul ne connaît. Elle tient la main du frère s’en allant vers l’Amour qui l’attend. Il me semble lire chez elle une perception de Jésus Roi, telle qu’il lui plaît d’habiter aujourd’hui nos vies. « Qu’as-tu donc fait ? » Pilate aurait été rassuré de disposer d’un grief contre ce Roi insaisissable. Puissions-nous être surpris en « flagrant amour » d’accomplir ce que, notre Roi nous demande de partager à tous.
22:16 Publié dans L'éclat du jour, Réflexions spirituelles | Lien permanent | Commentaires (0)
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