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15/12/2015

Andante pour trompette

13/12/2015

Loué sois-tu 3

globe.pngLe monde est plus qu’un problème à résoudre, il est un mystère joyeux que nous contemplons dans la joie et la louange. (n°12)
La conscience de la gravité de la crise culturelle et écologique doit se traduire par de nouvelles habitudes. Beaucoup savent que le progrès actuel, tout comme la simple accumulation d’objets ou de plaisirs, ne suffit pas à donner un sens ni de la joie au cœur humain, mais ils ne se sentent pas capables de renoncer à ce que le marché leur offre. Dans les pays qui devraient réaliser les plus grands changements d’habitudes de consommation, les jeunes ont une nouvelle sensibilité écologique et un esprit généreux, et certains d’entre eux luttent admirablement pour la défense de l’environnement ; mais ils ont grandi dans un contexte de très grande consommation et de bien-être qui rend difficile le développement d’autres habitudes. C’est pourquoi nous sommes devant un défi éducatif (n°209).
Marchons en chantons ! Que nos luttes et nos préoccupations pour cette planète ne nous enlèvent pas la joie de l’espérance (n°244).

 

12/12/2015

Vitrail et tamis

Article paru dans le numéro de décembre de la revue Paix et Joie de la Société des Prêtres de St François de Sales:

Pourquoi j’écris ? Je n’en sais rien. C’est comme ça.

Ecrire, c’est accrocher aux initiales fleuries des saisons
la remorque des jours, les chapitres de son Histoire.
Ecrire, c’est vouloir retrouver dans le miroir des années
le visage inconnu de l’enfant qu’on était.
Ecrire, c’est rêver à l’aune de ses révolutions
l’idée mûre qui dressera le château de nos trésors enfouis.
Ecrire, c’est puiser dans le sang de ses blessures
la médecine de ses résurrections
(inédit)

ecrire.jpgJ’ai conscience d’avoir reçu un don. Et tous les jours je remercie Dieu, le créateur, tout à la fois poète et potier. Il paraît que c’est le même mot dans la Bible.

Potier ou poète, peu importe, dans ton langage tu es les deux.
Tu as façonné le monde avec tes mains, avec tes mots aussi (…)
(inédit)

Voilà pourquoi devant Dieu, je ne peux qu’être humble, moi tiré de l’humus et partageant ma vie avec mes frères de route sur cette terre. Ainsi, je suis sensible à la beauté des choses et des êtres, beauté cachée parfois à l’image de la discrétion de Dieu, sensible aussi à la partie plus sombre de ce monde, persuadé qu’il y a du beau partout car Dieu est partout présent et il nous aime.

Par expérience, j’ai appris que le poète ne regarde pas le monde de l’extérieur, il n’est pas un rêveur solitaire comme on se l’imagine souvent. Au contraire, il est à l’écoute, il a les yeux ouverts. C’est la condition nécessaire pour épouser l’histoire des hommes et pouvoir prononcer une parole au nom de ceux qui cheminent avec lui et qui n’ont pas toujours les mots pour exprimer ce qu’ils vivent. Il est prophète, porte-parole.

Le poète est un vitrail qui filtre la lumière, un tamis qui retient les scories pour ne donner que le meilleur. Un poème n’est réussi que lorsqu’il entre en communication avec son lecteur ou auditeur et qu’il lui délivre une parole qui suggère, transporte et met en route.

Le poète n’écrit pas pour lui mais pour les autres. De ce point de vue, le poète et le prêtre ne font qu’un, un même ministère de la parole les unit.

Ainsi, les événements liés à Charlie Hebdo m’ont inspiré cette réflexion sur l’homme, sa fragilité mais aussi sa capacité de se reprendre :

ô mon frère,
brandis ton crayon !

ce n’est pas une mine de charbon
mais de l’or à foison
un trésor que tu tiens
entre tes mains

tu veux crier ? écris un poème !

bouge-toi
et le vent s’en mêlera

va plus loin que loin
vers la fin sans fin

et si le brouillard est une fumée sans feu
et si derrière un homme
il n’y a jamais qu’un homme

toi tu as
de la puissance rêveuse à vendre
et ce que tu veux c’est la vie
avec la lumière qu’elle procure
(inédit)


La récente actualité des réfugiés m’a aussi inspiré ce long poème :

La guerre roule derrière nous
son feu, son fer,
l’enfer nous poursuit jour et nuit
sans répit jusqu’à la mer. (…)

Nous sommes un peuple sans tanière,
sans gîte et sans couvert ;
pas de refuge pour qui fuit.

Nous n’avons que nos lambeaux de peau
pour nous couvrir les os,
peau huilée de l’exil,
peau iodée de l’exode.

Et devant nous, la mer
comme un tapis de prière,
dernier ourlet du continent
auquel résignés nous tournons le dos. (…)

Nous secouons la poussière,
les fourmis de nos sandales,
les scorpions de nos talons,
avant de prendre le cargo, le bateau, le radeau. (…)

Les yeux sans paupières
et le regard blanc,
un enfant meurt de faim
au sein de sa mère.

Et c’est la colère à voix basse,
colère à la merci de la mer.

Et nous voici meurtris,
fruits mâchés pour pourrir
au vent salé.

Et nous voici livrés
à la gueule de l’inconnu,
happés par la langue des sirènes.

Dieu, que fait-il ?
où est-il dans notre exil ?
Dieu, qui est parole
que dit-il dans notre exode ?

« Fais-nous revenir !
que ton visage s’éclaire
et nous serons sauvés ! »

Mais la nuit verse son encre
et rien ne s’écrit.

S’en remettre à demain
s’il nous donne la main,
si l’espoir allume son phare
aux horizons lointains.
(inédit)

Ces poèmes-cris ressemblent aux psaumes qui sont à mes yeux les plus beaux poèmes de l’humanité criant tour à tour sa joie et sa détresse. Ils sont aussi Parole de Dieu qui ont pris chair en Jésus, nomade sur les chemins de Palestine.
Mais toute la Bible n’est-elle pas le récit de mouvements de populations ; de errants et de pèlerins sur toutes sortes de chemins ; d’hommes, de femmes et d’enfants qui ont soif d’amour, de liberté, de Dieu ?

Nous sommes tous de ces errants
voulant toucher du doigt
les portes du mystère

Mais las de nos pèlerinages
nous laissons tomber nos genoux
sur le sable de nos déserts

Et nous nous reposons dans le silence
en écoutant battre le pouls
du Levant qui s’avance vers nous

(Après toi languit ma chair – 1992)

Pour conclure ou plutôt pour ouvrir sur la prière, car le poème peut se faire parfois prière, voici une courte méditation sur l’homme qui se reçoit de Dieu et sur la joie de Dieu qui créé l’homme par sa Parole. Poème d’inspiration salésienne. (IVD 1ère méditation)

A tout moment

Tu me prononces
et je suis
Tu me regardes
et je souris

Et me voici
rose entre tes mains
tirée
du vrai rien

Je ne suis pas grand-chose
mais tu te souviens de moi

Ô Dieu
est-il pour toi
plus beau cadeau
que cette éclosion ?

(Les jours sans bagages – 2004)

TP

08/12/2015

8 décembre

06/12/2015

Loué sois-tu 2

Image du Blog monia2009.centerblog.net


La sobriété, qui est vécue avec liberté et de manière consciente, est libératrice. Ce n’est pas moins de vie, ce n’est pas une basse intensité de vie mais tout le contraire ; car, en réalité ceux qui jouissent plus et vivent mieux chaque moment, sont ceux qui cessent de picorer ici et là en cherchant toujours ce qu’ils n’ont pas, et qui font l’expérience de ce qu’est valoriser chaque personne et chaque chose, en apprenant à entrer en contact et en sachant jouir des choses les plus simples. Ils ont aussi moins de besoins satisfaits, et sont moins fatigués et moins tourmentés. On peut vivre intensément avec peu, surtout quand on est capable d’apprécier d’autres plaisirs et qu’on trouve satisfaction dans les rencontres fraternelles, dans le service, dans le déploiement de ses charismes, dans la musique et l’art, dans le contact avec la nature, dans la prière. Le bonheur requiert de savoir limiter certains besoins qui nous abrutissent, en nous rendant ainsi disponibles aux multiples possibilités qu’offre la vie (n°223)

Pape François - Encyclique Loué sois-tu

04/12/2015

Relire sa vie

Le lent détachement de soi

Aujourd’hui tu es debout

au milieu de ta vie tu regardes

tu fais le compte

des jeux épars des outils des objets

tu vois les absents

autant que les présents

tu dénombres les fêtes et tes deuils

demain tu poursuivras

aujourd’hui tu te recueilles

9547fdf5c72ce8cf0297838133bf252a.jpgN’est-ce pas ce que nous éprouvons chaque matin, lorsque, émergeant tant bien que mal d’une nuit peuplée parfois de noirs pressentiments, nous prenons pied dans le jour neuf ? Tout à la fois étonnés d’être encore vivants ; reconnaissants et curieux, avides, mais aussi inquiets des rendez-vous annoncés : un examen médical, une rencontre délicate, une tâche ardue.

Nous sommes là au cœur de notre existence, nous essayons de distinguer le fil qui relie passé, présent et avenir. Nous tentons de comprendre, de nous comprendre, de nous rassembler, de nous recueillir pour mieux avancer.

J’en prendrai comme exemple ou plutôt comme image révélatrice le chemin de l’école. Combien de chemins d’école ai-je empruntés ? Depuis le tout premier, suivi le cœur battant, la main dans la main de maman, jusqu’à celui de professeur au seuil de la retraite. Je n’irai plus jamais à l’école. Entre les deux pôles, les chemins en compagnie de mes propres enfants et petits-enfants, parfois dans la hâte : « Vite ! descends de la voiture, je suis en contravention », parfois dans le plaisir : « Marchons tranquillement, nous sommes à l’avance. » Tantôt le cœur confit : « Ne me conduis plus jusqu’à l’entrée, les copains se moqueraient de moi » et tantôt attendri : « Tu es là je suis contente ».

Comme j’ai aimé les chemins d’école. Sauf en cas d’urgence, j’ai toujours préféré la voie buissonnière, la route qui sinue à travers villages et champs. Un sas entre foyer et métier, un espace entre la famille et les élèves ; une respiration au gré des saisons, à pied, à vélo, en voiture. Un jour, seule et l’autre, accompagnée d’une bande d’enfants – les miens, ceux des voisins – chahutant à l’arrière. En musique ou en silence. A me redire des poèmes ou à faire le vide, à prier. A relier.

Être au monde. Les spectacles familiers ou insolites qu’on peut observer tout au long du trajet sous la pluie ou dans le soleil. Et surtout le lent détachement de soi, pour entrer dans la dynamique des autres. Passer en revue les visages de la classe imminente, se remémorer la logique des différents cours, se promettre de lire à haute voix le début du livre découvert a veille ou s’inquiéter d’un élève en crise.

Il m’arrive de reprendre la route de l ‘école. Entre les arbres, j’aperçois le bâtiment ; je scrute les fenêtres, la plaine des jeux. Entrerai-je saluer mes anciens collègues à la faveur de la récréation ou attendrai-je l’apéritif de fin d’année. Et c’est bon de distinguer les fils tissés qui constituent la trame d’une existence. Chemin d’école, sans article dé » fini ou indéfini ; piste de vie.

Il est une relecture de sa vie qu’il vaut mieux fuir, une forme d’examen de conscience pervers qui consisterait à inventorier toutes les erreurs accumulées. Au contraire, comme il est bon, au terme du jour comme au sommet d’une vie, près de celui ou de celle qui s’en va, de dresser l’inventaire des dons et des grâces, des moments ensoleillés, des épreuves traversées, des rencontres primordiales, des pleins surgissant des creux.

Dans la lumière de la reconnaissance, se déchiffrent les sens, s’affirme la présence d’un amour plus fort que la mort, se transfigure en robe de fête le tissu parfois terne de notre quotidien.

Colette Nys-Mazure, écrivain, dans La Croix du 26 octobre 2007