30/10/2007
Psaume du pèlerin
Si tu veux faire une visite,
visite les saints :
ne pense à aucune autre occupation.
Ils cherchent un seul trésor, Dieu :
leurs lèvres ne murmurent aucun autre nom.
Si tu désires des compagnons,
choisis les saints :
ne pense à aucune autre amitié.
Si tu veux t’asseoir,
fais-le parmi les saints :
ne pense à aucun autre repos.
Si tu veux marcher,
va au village des saints :
ils te donneront la paix.
Les saints, dit Toukâ,
un océan de bonheur :
ils te donneront d’infinies richesses.
extrait des Psaumes du Pèlerin de Toukârâm
chant LXXXV
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26/10/2007
Tenue de service
Pour qui parcourt la Bible à grands traits, une chose saute aux yeux très vite : l’usage extrêmement fréquent du mot « serviteur ». « Mon serviteur, Moïse », « Le serviteur de Yahwé » dans Isaïe. La tenue – et l’attitude – de serviteur de Jésus, dans le lavement des pieds. A l’évidence, nous sommes là devant une posture biblique essentielle.
Avec ce mot « serviteur », nous sommes sur une ligne de crête. Laissons de côté ce qui nous ferait pencher sur le versant servile, serf, servitude. Arrêtons-nous aux beaux mots de service, servir, servant. On dit parfois que le meilleur service à rendre à quelqu’un est de lui demander un service. (à méditer). Il peut être intéressant de rappeler au passage que le mot latin ministerium, qui se traduit par service, adonné aussi deux beaux autres mots : ministère et métier. Par exemple, ne dit-on pas de quelqu’un qui fait son métier avec abnégation qu’il exerce un véritable sacerdoce ? Le service n’est pas tant à situer du côté du dévouement que de l’attitude naturelle – et spirituelle – de l’amour du frère pour le frère. Faire cela, c’est bien faire son job de chrétien, c’est accomplir son métier d’humain. En ce sens, on peut être qualifié de serviteur « quelconque », non pas serviteur avec la valeur ajoutée « dévouement », mais homme, femme, en tenue habituelle, quotidienne, de service. Un geste simple dit bien cela : celui qui sort de l’eau une personne qui se noie et qui va son chemin, disant : « C’était normal. » Oui ; c’est normal (quelconque, en somme) pour un disciple de Jésus d’être en tenue – et attitude – de service.
P. Jo Rival, aumônier général du Secours Catholique14:00 Publié dans Réflexions spirituelles | Lien permanent | Commentaires (0)
25/10/2007
L'homme qui vacille
L’homme, lointainement dans le temps, est cet hominien qui se met debout. « Homo erectus ». Et il marche à travers le monde, se répand, conquiert les espaces ; il devient « Homo sapiens », marche à travers l'esprit, conquiert les savoirs et les sagesses. Ces derniers temps, il a découvert l'infiniment petit, a marché sur la lune. Il s'est mis debout comme homme libre, égal, fraternel, en droit et en dignité, parmi tous les être humains, avec eux.
Cet homme qui est debout coexiste de plus en plus avec une sorte de double qui lui colle à la peau, un double qui est aussi fragile qu'il est, lui, puissant ; un double que l'on pourrait appeler « homme qui vacille ».
Tant de certitudes et pourtant perdant pied, déterminés et pourtant mal assurés, fermes et pourtant traversés d'hésitations, résolus et pris de vertige : tels nous sommes aujourd'hui, indissolublement écartelés. Il nous faut désormais vivre dans cet état, apprendre à l'assumer.
On parle beaucoup de précarité depuis quelques années. Non pas seulement dans le sens de cette vulnérabilité inhérente à la vie humaine comme en parlait Camus qui évoquait souvent « la précarité réelle de la condition humaine ». Mais aussi dans une constatation d'une précarité qui se déploie dans notre époque moderne et au coeur même des vies ordinaires ; toutes les vies, désormais, sont promises à la précarité ; car, chacun désormais le sait, si l'on n'est pas précaire, on le sera un jour, ou on pourra l'être un jour. En même temps que toutes les certitudes du monde, sont maintenant présentes, dans les existences humaines, toutes les précarités du monde.
L’homme de tous les jours vacille dans sa vie ordinaire. Qu'est-ce qu'une vie ordinaire ?
Celle, nous dit le philosophe Paul Ricoeur, qui se déroule dans une certaine stabilité parce qu'elle peut à peu près mettre en oeuvre quatre « capacités » fondamentales : pouvoir dire, pouvoir agir, pouvoir raconter et enfin pouvoir se croire capable de dire, de faire, de se raconter. La précarité commence lorsque ces capacités sont atteintes ; on vacille, on est alors déstabilisé. Un jeune philosophe, Guillaume Le Blanc, a repris la recherche de Paul Ricoeur, l'a excellemment poursuivie et élargie dans son livre ³Vies ordinaires, vies précaires² (Seuil, 2007) ; il interroge ces vies fragilisées où des êtres humains sont dans la société sans plus y être, « un pied dedans, un pied dehors » ; il se demande « ce qu'est une société qui produit structurellement de la précarité » ; il explore les souffrances, tant sociales que psychiques, qu'engendre l'épreuve de la précarité.
Mais quel programme pour que ces « vies précaires » puissent ne plus suffoquer et retrouver une respiration normale ? Leur redonner la possibilité d'un agir créateur. Comment ? En commençant par le commencement, en reconnaissant, là où elles sont, ces vies précaires, telles qu'elles sont ; et le plus grand obstacle, c'est qu'elles sont souvent quasiment invisibles n'étant pas dans une exclusion radicale ; il y a aussi ceci qu'elles veulent donner le change, faire comme si tout allait bien ou pas trop mal.
Reconnaître l'autre qui est dans une vie précaire est impossible si nous sommes dans notre fortin, bardés de certitudes et d'assurance, si nous n'avons pas osé, par peur, regarder nos propres précarités. Celui qui est sans blessure, durci dans ses convictions où il croit « dur comme fer » sans jamais douter, ne peut que passer à côté des blessés de la route sans même s'apercevoir de leur existence. Mère Teresa, si elle avait cru d'une foi compacte et fermée, si elle n'avait pas vécu sa foi dans une vraie précarité, aurait-elle eu à coeur les plus humainement déshérités ?
Oui, nous ne sommes pas seulement l'homme debout mais aussi l'homme qui vacille ; et sans doute est-ce une bénédiction pour l'avenir de l'humanité que se fasse aujourd'hui de plus en plus cette prise de conscience sans laquelle notre monde se couperait de plus en plus en deux secteurs totalement antagonistes, en deux sortes d'êtres humains, les clos sur eux-mêmes et les exclus, aussi perdus les uns que les autres.
Jean-François SIX in ‘lettre du 127’, n° 25, octobre 2007
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23/10/2007
It's five o'clock
Aphrodite's Child - It's Five O Clock (1968)
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20/10/2007
La lettre
Un point de vue.
En tant que responsable du pôle aquitain de l'adolescent au CHU de Bordeaux, que pensez-vous des réactions que pourrait susciter la lettre de Guy Môquet auprès de lycéens ?
En lisant la lettre de Guy Môquet, j'ai été frappé par ses similitudes avec les lettres d'adieu de jeunes qui veulent se suicider ou qui l'ont fait. Aujourd'hui, un adolescent qui voudrait en finir n'écrirait pas autre chose que ce qu'a écrit Guy Môquet.
J'ai moi-même étudié plus de 500 lettres d'adieu de jeunes suicidants ou suicidés. Ils écrivent des lettres extrêmement pathétiques, qui sont rarement accusatrices, contrairement aux lettres d'adultes. Les adolescents essaient d'atténuer la violence de leurs actes. Ils sont conscients de la souffrance qu'ils vont infliger à leurs proches et ils redoublent de mots tendres à leur égard. Ils peuvent très bien utiliser les expressions de Guy Môquet comme "Ma petite maman chérie", demander, comme lui, qu'on embrasse le petit frère, qu'on donne tel objet à telle personne.
C'est pourquoi, ce qui me paraît essentiel, vu la teneur de ce courrier bouleversant, c'est de le restituer impérativement dans son contexte. Il ne faut surtout pas le livrer comme cela sans développer les circonstances qui ont conduit à la mort de ce jeune homme de 17 ans et demi auquel peuvent s'identifier de jeunes lycéens.
Craignez-vous que cette lettre lève le tabou de la mort chez l'adolescent ou exalte l'idée de sacrifice ?
Cette lettre reste sur le registre de l'émotion et il faut éviter tout contresens. Rien ne dit que le jeune homme n'a pas choisi de mourir, y compris en se sacrifiant. Sortie de son contexte, elle peut avoir un aspect extrêmement pathétique et mobilisateur. Les lettres d'adieu que l'on trouve aujourd'hui ne sont pas celles de jeunes résistants mais de jeunes suicidants. Et le suicide est la seconde cause de mortalité chez les 15-24 ans après les accidents de la route. Je le répète, il faut impérativement lever le doute. Ce n'est pas la lettre de quelqu'un qui a choisi de mourir.
Pensez-vous qu'il ne fallait pas choisir de lire cette lettre à des lycéens ?
Je ne dis pas cela. Si on la restitue dans son contexte, c'est impeccable. Ce texte est l'occasion de parler de la Résistance, du comportement que tout être humain pourrait avoir dans ces mêmes circonstances, de parler non seulement de la seconde guerre mondiale mais du rapport à la mort, de ce qui est héroïque mais aussi de ce qui ne l'est pas. Guy Môquet n'est pas une victime sacrificielle et n'a rien à voir, par exemple, avec de jeunes kamikases d'aujourd'hui qui peuvent se faire exploser sur un marché à Bagdad.
Cette lettre offre aussi l'occasion de parler du courage. Le message qu'elle délivre est très positif. Elle montre un jeune extrêmement courageux qui pense d'abord à ses proches. En plus du contexte historique, les professeurs peuvent aussi rappeler que Guy Môquet était un jeune homme comme eux, qu'il avait une fiancée, Odette, ce que rien ne laisse deviner dans la lettre, et qu'il dira à ses copains, avant de mourir, combien il regrette de ne pas avoir pu l'embrasser.
Que pensez-vous des syndicats qui dénoncent dans la lecture de cette lettre une approche compassionnelle de l'Histoire ?
Heureusement que l'Histoire est faite de témoignages et que des jeunes gens l'incarnent. Le Dormeur du val, poème écrit par Arthur Rimbaud à 16 ans alors qu'éclate la guerre de 1870 et qui dénonce l'utilisation des jeunes gens comme chair à canon est un témoignage émouvant comme l'est celui de Guy Môquet.
Propos recueillis par Martine Laronche
Dans Le Monde du 19 octobre 2007
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17/10/2007
Chimène
Rene Joly Chimène - 1970 (René Joly - Gérard Manset)
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