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05/11/2014

Etrange et bizarre

moutons.jpgLes grandes personnes sont bien étranges.

Quand on les croise sur le trottoir, elles regardent la pointe de leurs pieds de peur qu’un regard ne leur vole un jardin secret ou ne fasse découvrir qu’un jardin désert. Mais leurs chaussures ne sont plus vernies depuis longtemps, impossible de s’admirer dedans depuis qu’ elles empruntent tous les jours de la semaine et même samedis, dimanches et fêtes le chemin des habitudes.

Elles ont les mains dans les poches serrant un téléphone mobile, une carte bancaire ou la menue monnaie pour leurs gourmandises, leurs petits plaisirs. Elles surveillent du coin des yeux celui ou celle qui pourrait surgir et qui mettrait fin à leur solitude mal habitée. Dans leur coquille d’escargot, elles doivent en baver pour être comme ça.

Tristes, seules, renfrognées, agglutinées, repliées sur elles-mêmes, on dirait des épouvantails, des moutons, des petits singes, des fourmis. Bien étrange tout cela. Grégaire. Elles peuvent toujours pleurer sur leur sort, Ieurs larmes ne les laveront pas de leur inconsistance.

Les magasins sont ouverts, les parkings pleins… c’est là qu’elles viennent ce premier novembre. Pas le temps et surtout pas l’idée de penser aux morts… d’ailleurs ils sont déjà tous morts ces gens qui essaient de meubler leur ennui comme une éternité longue depuis l’instant où ils ont posé le pied à terre, car l’autre pied ils l’ont déjà dans la tombe !

Je ferme la fenêtre et j’ouvre le livre.

Dans « La petite musique du silence », Yves Duteil écrit : « Heureux qui communique » puis plus loin « Nos absents nous accompagnent ». Qui parle à qui ? et qui accompagne qui ?

Je pense à grand-père, je pense à grand-mère et à tant d’autres déjà. Je les vois, ils me sourient, ils sont là. Leur douce présence me parle et m’accompagne. Ils sont morceaux de ciel bleu, chrysanthèmes épanouis, musiques de fête secrète entre nous. Eux et moi, on se raconte de belles histoires.

Je ferme le livre, retourne à la fenêtre, écarte un pan de rideau, essuie un peu de buée. Dehors le ciel est gris, la vie  menaçante, le monde bruyant, les gens courent comme balayés par un mauvais vent. Les grandes personnes sont étranges, étrangères les unes aux autres, indifférentes.

Je ferme les yeux et me dis : c’est peut-être moi qui suis bizarre.      TP

04/11/2014

Pluie

George Ezra - Did you hear the rain (2014)

20:04 Publié dans Chansons | Lien permanent | Commentaires (0)

03/11/2014

Esseuillement

portes-battantes.jpg

le dedans veut sortir

et le dehors entrer

la porte qui bat

invente un huis non clos

un seuil pour le rythme

qui répartit les deux côtés

 

 

au-dedans du dedans

reclosant l'intérieur

le coeur mis au secret

scelle et montre le tout

la partie qui l'intègre

n'ignore pas les autres

 

Michel Deguy - Comme si comme ça - Poésie Gallimard

00:00 Publié dans Poèmes | Lien permanent | Commentaires (0)

02/11/2014

Le jour des morts

LE JOUR DES MORTS

 

medium_cimetière 005.jpg

 

Lugubrement la cloche tinte,
C'est aujourd'hui le Jour des Morts
Le vent jette sa longue plainte
Dans la campagne couleur d'or...

Dans les cyprès du cimetière
Les moineaux gris, bien tristement
Jettent leurs cris, douce prière,
De ceux qu'on croit indifférents.

La vieille église, en sentinelle,
Voit défiler les pèlerins
Qui vont couronner d'immortelles
les vieux crucifix de fer peint...

La foule anxieuse et recueillie
S'agenouille autour des tombeaux...
Chacun dans un murmure prie,
Tristement, comme les moineaux...

L'angoisse étreint les coeurs, les âmes,
On se relève pieusement,
Les pleurs voilent les yeux des femmes,
Qui se signent dévotement.

L'angelus sonne dans la brume,
On prend le chemin du retour,
Sans hâte vers le bourg qui fume
En songeant et priant toujours.

 

Joseph Delort (1894-1916)

01/11/2014

Toussaint

 
Heureux celui qui garde les mains vides,

Et laisse l'or et l'orgueil aux avides :

Un roi grandit dans le pauvre comblé.

 

Heureux celui qui, face aux violences,

Est lisse tel un roseau sans défense :

Les doux tiendront sur le monde ébranlé.

 

Heureux celui qui sait le don des larmes,

La grâce amére où la lutte désarme

C'est l'affligé qui sera consolé.

 

Heureux celui dont le coeur et la tête

Ont faim et soif de justice parfaite :

Il trouvera sous la vigne le blé.

 

Heureux celui qui saigne mais pardonne

Et rend le bien pour le moral qu'on lui donne.

Devant son juge il parait sans trembler.

 

Heureux celui qu'épargne toute fange :

Du clair regard où se mirent les anges,

Il verra Dieu sans en être aveuglé.

 

Heureux celui qui sème la concorde,

Les mots de miel dans les bouches qui mordent :

Un arc en ciel viendra l'auréoler.

 

Heureux tous ceux que d'autres jugent dignes

Du vieux mépris dont le croix est le signe :

Car du Royaume ils possédent la clé.

 

Office des Heures.