24/03/2006
Le Christ au palais de l'ONU
Poussé par la foule lasse et excédée, le Christ arriva au palais de l'ONU.Il avait le visage blême du chômeur, le pas incertain du réfugié, les épaules voûtées du mineur, l'oeil triste du Palestinien,les mains inertes du Sibérien,le coeur avide d'un jeune.
Il n'était recommandé par personne. Les larmes des humbles seules le faisaient avancer. La justice pour les faibles était sa seule force. Il frappa à la porte,mais, pour lui, c'était le "veto". Les hommes n'étaient pas libres. Au seuil du monde civilisé, il trouva la barbarie.
Il lut les Droits de l'homme et fut saisi de compassion.
L'homme a le droit à la vie, mais un enfant assassiné lui dit que ce n'était par vrai.
L'homme a droit à l'instruction, mais un Indien lui dit que c'était pure plaisanterie.
L'homme a droit au travail, mais un Africain du Sud lui dit que depuis vingt cinq ans c'est le contraire qui est vrai.
L'homme a droit à la paix, mais une veuve de guerre lui dit que personne ne pensait à elle.
L'homme a droit à la famille, mais un enfant d'orphelinat lui demanda ce que signifiait ces mots.
L'homme a droit à la liberté, mais un Argentin se mit à pleurer.
Et le Christ redescendit les marches du palais de verre.
Quand la foule lui demanda le résultat de sa visite, le Christ étendit les bras : il était alors crucifié, comme le Vendredi Saint.
Alors la foule se dispersa. Il pleuvait. Et le Christ demeura sous la pluie comme tant d'autres. Personne ne s'arrêta. Personne ne l'invita à monter en voiture.
D’après Pier Luigi Torresin, « Christo ancore un croce »
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19/03/2006
La colère de Jésus
23 mars 2003
Année B: 3e dimanche du Carême
Jean 2, 13-25 « Il (Jésus) trouva installé dans le Temple les marchands de boeufs, de brebis et de colombes, et les changeurs. » (v. 14)
On s’imagine mal un geste, comme celui de Jésus chassant les vendeurs du Temple, posé aujourd’hui à quelque endroit de notre institution ecclésiastique. Celui ou celle qui oserait s’y aventurer recevrait certainement une grande part de réprobation de ceux qui sont au pouvoir et même d’humbles personnes croyantes pour qui l’institution est sacrée. On entendrait les mêmes discours sur le respect du sacré. Des voix s’élèveraient pour suggérer d’autres actions moins radicales.
À plusieurs, ce passage d’Évangile est apparu trop compromettant pour l’image qu’on s’est souvent construite autour de Jésus. Dans mon enfance et plus tard aussi, j’ai souvent entendu que Jésus avait fait une « sainte colère ». J’avais vite compris alors que ce n’était pas une colère comme on en fait nous-mêmes. Jésus ne pouvait pas laisser monter en lui de tels sentiments; ce serait un manque de contrôle de lui-même évident. N’était-il pas Dieu? Je ne savais pas, ignorant que j’étais des textes de Premier Testament, que Dieu lui-même pouvait faire d’immenses colères.
Pourtant, devant ce qu’était devenu le Temple, Jésus n’avait plus d’autre choix que de poser un geste fort provocateur et, à bien des égards, au risque même de sa vie. Le Temple était alors un lieu où on marchandait Dieu. C’en était trop. Il sent que les paroles ne suffisent plus. Il passe aux gestes qui traduisent plus fortement ce que des prophètes ont perçu comme étant la « passion de Dieu ». Ce trafic d’animaux et d’argent exaspère Jésus, qui se rend bien compte que tout cela n’a rien à voir avec la foi en Dieu.
Ce passage de Jean nous fait voir une facette peu connue et peu commune de la personnalité de Jésus. Si Jésus avait la passion de Dieu - et il l’avait -, c’est qu’il tenait, au prix même de sa vie, à ce que cette relation à Dieu soit gratuite, gratifiante. Il tenait à ce que cette relation soit ouverture, espérance et non marchandage de toutes sortes, tant dans les gestes que les paroles. Il tente d’ouvrir le Temple qui se refermait, pour ouvrir ainsi la relation à Dieu.
La colère de Jésus veut déranger, déplacer, interroger les juifs. Dieu ne se tient pas dans ces endroits de marchandage, mais il vit en nous à même la qualité de relations que Jésus entretient avec Lui et qu’il veut nous laisser, en mémorial, comme un chemin à suivre. Le véritable Temple doit s’ouvrir aux dimensions du monde, un monde sensible à la pauvreté des personnes. C’est un corps à bâtir dans la fragilité et la gratuité. Et c’est lorsque les paroles ne sont plus entendues, qu’il ne reste que les gestes prophétiques. Et si on sait l’interpréter, il s’agit d’un geste de résurrection. Désormais, « Dieu est partout », là où le coeur humain s’ouvre à son accueil et à l’accueil des autres.
Tout est dit fortement dans ce geste. Nous n’avons plus à marchander Dieu ou avec Dieu, c’est un cul-de-sac. Dans nos assemblées, dans nos réflexions communes ou individuelles, il s’agit de créer un espace de gratuité, dans le pardon mutuel, dans la reconnaissance de l’autre.
Par sa colère et ses coups de fouet, Jésus a voulu, de façon forte, rouvrir cet espace du coeur humain.
GUY LAPOINTE
Montréal
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18/03/2006
Histoire de cailloux
Un jour, un vieux professeur de l’École nationale d’administration publique (ENAP) fut engagé pour donner une formation sur la planification efficace de son temps à un groupe d’une quinzaine de dirigeants de grosses compagnies nord-américaines. Ce cours constituait l’un des cinq ateliers de leur journée de formation. Le vieux prof. n’avait donc qu’une heure pour "passer sa matière". Debout, devant ce groupe d’élite (qui était prêt à noter tout ce que l’expert allait enseigner), le vieux prof les regarda un par un, lentement, puis leur dit :
« Nous allons réaliser une expérience ».
De dessous la table qui le séparait de ses élèves, le vieux prof sortit un immense pot Mason d’un gallon (pot de verre de plus de 4 litres) qu’il posa délicatement en face de lui. Ensuite, il sortit environ une douzaine de cailloux à peu près gros comme des balles de tennis et les plaça délicatement, un par un, dans le grand pot. Lorsque le pot fut rempli jusqu’au bord et qu’il fut impossible d’y ajouter un caillou de plus, il leva lentement les yeux vers ses élèves et leur demanda :
« Est-ce que ce pot est plein ? ».
Tous répondirent : « Oui ».
Il attendit quelques secondes et ajouta : « Vraiment ? ».
Alors, il se pencha de nouveau et sortit de sous la table un récipient rempli de gravier. Avec minutie, il versa ce gravier sur les gros cailloux puis brassa légèrement le pot. Les morceaux de gravier s’infiltrèrent entre les cailloux... jusqu’au fond du pot.
Le vieux prof leva à nouveau les yeux vers son auditoire et redemanda « Est-ce que ce pot est plein ? »
Cette fois, ses brillants élèves commençaient à comprendre son manège. L’un d’eux répondit :
« Probablement pas ! ».
« Bien ! » répondit le vieux prof
Il se pencha de nouveau et cette fois, sortit de sous la table une chaudière de sable. Avec attention, il versa le sable dans le pot. Le sable alla remplir les espaces entre les gros cailloux et le gravier. Encore une fois, il demanda : « Est-ce que ce pot est plein ? ». Cette fois, sans hésiter et en chœur, les brillants élèves répondirent « Non ! » .
« Bien ! » répondit le vieux prof.
Et comme s’y attendaient ses prestigieux élèves, il prit le pichet d’eau qui était sur la table et remplit le pot jusqu’à ras bord. Le vieux prof leva alors les yeux vers son groupe et demanda : « Quelle grande vérité nous démontre cette expérience ? »
Pas fou, le plus audacieux des élèves, songeant au sujet de ce cours, répondit :« Cela démontre que même lorsque l’on croit que notre agenda est complètement rempli, si on le veut vraiment, on peut y ajouter plus de rendez-vous, plus de choses à faire ».
« Non » répondit le vieux prof « Ce n’est pas cela. La grande vérité que nous démontre cette expérience est la suivante : si on ne met pas les gros cailloux en premier dans le pot, on ne pourra jamais les faire entrer tous, ensuite ».
Il y eut un profond silence, chacun prenant conscience, de l’évidence de ces propos.
Le vieux prof leur dit alors:
« Quels sont les gros cailloux dans votre vie ? Votre santé ? Votre famille ? Vos ami(e)s ? Réaliser vos rêves ? Faire ce que vous aimez ? Apprendre ? Défendre une cause ? Relaxer ? Prendre le temps ... ? Ou... toute autre chose ? Ce qu’il faut retenir, c’est l’importance de mettre ses GROS CAILLOUX en premier dans sa vie, sinon on risque de ne pas réussir... sa vie. Si on donne priorité aux peccadilles (le gravier, le sable), on remplira sa vie de peccadilles et on n’aura plus suffisamment de temps précieux à consacrer aux éléments importants de sa vie. Alors, n’oubliez pas de vous poser à vous-même la question :
"Quels sont les GROS CAILLOUX dans ma vie ?"
« Ensuite, mettez-les en premier dans votre pot (votre vie). »
D’un geste amical de la main, le vieux professeur salua son auditoire et lentement quitta la salle.
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10/03/2006
La dame aux yeux fermés
Nous étions peu nombreux, environ une douzaine de personnes, à une lecture de poèmes à la médiathèque cette semaine, dans le cadre du Printemps des Poètes. Les gens ne sortent pas quand il pleut... mais surtout, les gens ne sortent pas pour écouter de la poésie! De quoi ont-ils peur?
Parmi nous, il y avait une vieille dame, venue seule, avec un long manteau et un bonnet sur la tête qu'elle n'a pas quitté de toute la veillée. Elle n'a parlé à personne et personne ne lui a parlé non plus. Chose étrange, elle a toujours gardé les yeux fermés. Sans doute était-elle mal voyante, car tout à coup, entre la lecture de deux poèmes d'un recueil dont le titre est "Recueillement", voici que sa montre se met à parler: "Il est 21h". Petit sourire de tout le monde, bien sûr, mais la vieille dame n'a pas bougé d'un poil, on pourrait même dire d'un cil! Elle était dans le recueillement, elle méditait chaque parole, elle était sans doute venue se ressourcer. Discrète, personne ne l'a vue partir avec son plein de poésie.
J'ai trouvé sa présence surprenante et belle, presqu'un témoignage. Chacun de nous a beaucoup reçu dans cette soirée, nous nous le sommes partagés, et elle, par sa seule et simple présence et par son silence nous a dit que le plus cadeau était intérieur: la poésie comme source et racines de ce qui fait nos vies, comme ce qui alimente le feu de nos coeurs, comme ce qui calme notre faim et nous enchante... le reste n'est que bavardage dans un monde de bruits. Merci madame. TP
08:30 Publié dans L'ordinaire des jours, Poèmes, Réflexions spirituelles | Lien permanent | Commentaires (1)
04/03/2006
La légende de l'arc-en-ciel
Un beau jour, toutes les couleurs du monde entier se mirent à se disputer. Chacune prétendait qu’elle était la plus belle, la plus importante, la plus utile, la préférée !
Elles se vantaient, à haute voix chacune étant bien convaincue d’être la meilleure. Le bruit de leur querelle s’enfla de plus en plus. Soudain, un éclair d’une lumière aveuglante apparut dans le ciel, accompagné de roulements de tonnerre. La pluie commença à tomber à torrents sans discontinuer. Effrayées, toutes les couleurs se tapirent et se rapprochèrent pour chercher un abri les unes après les autres ;
La pluie prit la parole : « Stupides créatures qui vous battez entre vous, chacune essayant de dominer l’autre, ne savez-vous pas que c’est Dieu qui vous a faites toutes chacune dans un but particulier, uniques et différents ?
Il aime chacune d’entre vous, il a besoin de vous toutes. Joignez vos mains et venez à moi. Il va vous étendre à travers le ciel en un magnifique arc-en-ciel, pour vous montrer qu’il vous aime toutes, que vous pouvez vivre ensemble en paix. Comme une promesse qu’il est avec vous, et comme un signe d’espérance pour demain . »
Ainsi, chaque fois que Dieu envoie une pluie pour laver le monde, il place l’arc-en-ciel dans son ciel, et quand nous l’apercevons nous devrions nous rappeler qu’il veut que nous sachions, nous aussi, nous apprécier les uns les autres et le louer de notre merveilleuse complémentarité.
(légende indienne)
Pour ce premier dimanche de carême où il est question de Noë, du déluge et de l'arc-en-ciel dans la liturgie.
09:40 Publié dans Poèmes, Réflexions spirituelles | Lien permanent | Commentaires (0)
02/03/2006
Et si en plus y'a personne
" Et si en plus y'a personne", c'est une chanson d'Alain Souchon, le premier single de son nouvel album "La vie, Théodore". Ecouter Alain Souchon, c'est frais de poésie, c'est joliment chanté, avec dans certains chansons un brin d'engagement. J'ai découvert son talent en 1974 avec "L'amour 1830", très romantique, un peu surrané, mais digne d'intérêt pour une suite prometteuse, et l'avenir l'a bien révélé. Mais j'avoue que son dernier titre m'a mis mal à l'aise, sans doute parce que ce qui est dit est malheureusement juste: Alain Souchon, comme beaucoup de nos contemporains, assimile religion et violence. Cependant il explique aussi avoir voulu être prêtre quand il était petit, dans un entretien publié par l'hebdomadaire catholique Le Pèlerin.dont voici quelques extraits:
"La religion conduit parfois à des excès, comme toutes les certitudes. C'est ce que j'ai voulu dire dans cette chanson, rien d'autre. En aucun cas je n'ai cherché à choquer", dit-il, "les athées convaincus me font peur aussi… Les hommes cherchent toutes les occasions pour s'entretuer ; depuis des millénaires, ils se zigouillent sous des prétextes différents et la religion en est un. A cause d'elle, parfois, ils deviennent fous. Il suffit de regarder la télé, les attentats, l'Irak, George Bush. Pourtant, je l'aime moi la religion, je passe mon temps dans les églises, à réfléchir, à méditer, je vais parfois écouter les sœurs d'un couvent breton chanter des cantiques… Tenez, j'ai même voulu être prêtre quand j'étais petit…Moi, tout ce que je peux dire c'est que je ne suis pas sûr. Le Ciel est vide? peut être... j'espère que non, j'aime bien l'idée qu'il existe un Dieu créateur, mais je ne suis pas sûr, je n'aime pas les certitudes".Plus loin, il ajoute: "j'aimerais bien avoir la foi, oui vraiment ça m'aiderait. Parfois je me surprends à prier, mais au bout de quelques instants je m'arrête, je fais: ‘mais qu'est-ce que tu fais? à qui tu parles, là ?’...".
Comme cela est terrible de douter mais comme ces propos me réconcilient avec l'artiste!Il dit si bien ce que beaucoup pensent et il est l'un de nous. Mais cette chanson doit être plus qu'un miroir: une invitation à changer notre regard et notre coeur. TP
09:35 Publié dans Musiques, Réflexions spirituelles | Lien permanent | Commentaires (0)