12/08/2022
Labeaume
Labeaume en Ardèche
retient son souffle mêlé de sueur
et son arôme moite
le soleil nous crache son feu à la figure
dans la rue sans voiture
escalier de cailloux qui roulent sous nos pieds
une voûte conserve un peu d'ombre sans fraîcheur
une porte bleue
un peu de verdure
descendre
les yeux fixés sur ses chaussures
et s'arrêter
pour regarder derrière soi
s'il n'y a pas un peu d'air pur
qui ferait danser les arbres
où s'arment les cigales
en jouant de leurs cymbales
TP
18:00 Publié dans Poèmes, Souvenirs | Lien permanent | Commentaires (0)
09/08/2022
Balazuc
La rue est un escalier
Sous des pas mal assurés
la grimpée fait danser la tête
et dans la chaleur intense
d'une matinée de juillet
en Ardèche
le ciel est blanc
le souffle court
et la langue sèche
Au sommet
le clocher ajouré de Balazuc
appelle la volonté
d'y arriver
TP
17:00 Publié dans Poèmes, Souvenirs | Lien permanent | Commentaires (0)
Souvenir d'Ardèche
Sous un soleil de miel et de plomb
le Pont du Diable tient bon.
Quelques cailloux font la plage
et quelques fous font des plongeons
dans un trou d'eau
béni par sa fraîcheur,
sous les yeux des photographes
qui emporteront chez eux
la chaleur de l'Ardèche
et la sueur brûlante
léchant leurs pieds poudreux.
TP
11:00 Publié dans Poèmes, Souvenirs | Lien permanent | Commentaires (0)
01/08/2022
L'étranger
Tu te crois seul et puis quelqu’un
se tient debout dans l’embrasure de l’aurore.
Il ne dit rien. Sa main éclose
vers toi se tend, se ramifie à ton approche.
Qui oserait : si mince est la
paroi de verre entre ce monde et l’autre.
Mais à ses yeux qui le débordent,
tu sens qu’il voudrait tant se délivrer
de fraternelles confidences.
Et comment soutenir le poids de ce visage
cherchant asile et ressemblance
à travers le miroir de ces mots sans famille :
“Je suis un homme de passage.”
Gilles Baudry
22:31 Publié dans Poèmes | Lien permanent | Commentaires (0)
25/05/2022
Chantier du poème
L’arrivée du poème est multiple.
La plupart du temps, il progresse comme une vague qui déroule sa turbulence d’images et de mots.
Il s’organise parfois autour d’un mot clef.
Mot-noyau, tombant dru, bousculant le vocabulaire pour se chercher plus loin.
Mais plus encore : soulèvement du dedans; mouvement en quête de ses rythmes, de sa forme-paroles.
Greffes, le mot s’impose.
Cet œil, ce bourgeon inséré dans le vif d’une plante, me parle infiniment.
Greffe qui donne lieu à une vie autre; à un renouveau à partir d’une blessure, d’un manque.
Les analogies affluent, les images se chevauchent.
Je les accepte, je les inscris, en vrac.
Les mots viennent dans une sorte de tohu-bohu, à l’intérieur duquel – plus tard, je le sais -, je découvrirai mon pain, mon eau; et comme une direction.
Rarement le poème m’est donné d’un trait.
En général, il m’arrive comme une matière brute, dans laquelle je fourrage et trouve, peu à peu, une ordonnance, des rapports, des sonorités.
Serrant les écrous, rejetant le plâtre, repoussant les écorces, je tente d’aller au plus près de ce mouvement initial qui fait écrire.
De ce mouvement qui – peut-être, tout simplement – fait vivre, en densité.
Souvent, très souvent, presque malgré moi, je me trouve en face des mêmes thèmes.
Balancement des contraires : obscur-clair, horreurs-beauté, grisaille-souffles, puits-ailes, dedans-dehors, chant et contre-chant.
Pouble-pays, en apparence; mais que la vie brasse, ensemble, inépuisablement.
Les mots, je les souhaite au service d’un sens (dont la raison ne rend jamais tout à fait compte).
Au service d’une signification qui puisse être partagée.
Ou – du moins – d’une question si primordiale, qu’elle pourrait être celle de tous, et de chacun.
Je m’attelle pour cela à un long travail d’éluci-dation; m’efforçant à la transparence des mots, cherchant pour autant à ne pas affadir le troublant mystère de la poésie, de la vie.
J’aime que le mot soit rétif.
Mot sur lequel on bute, et sans lequel le poème ne tiendrait pas.
J’aime le traquer ce mot, partout : dans la vie courante, dans d’autres textes, dans le journal, sur une affiche, dans le métro…
Soudain, il tombe comme un fruit mûr sur un sol en attente; ou se laisse capturer, comme l’oiseau, dans les filets patiemment tendus.
Ce mot que l’on sent juste (qui sonne juste, je lis haut pour l’oreille) fait que l’on peut quitter le poème, en repos.
On s’éloigne, libre; pour renaître, haletant, devant le texte à venir.
Rien de moins abstrait, de moins factice, que cette préoccupation.
Le corps, la circulation sanguine, la respiration s’en ressentent.
La poésie, par moments, nous grefferait-elle à la totalité, à l’ouvert?
A la vraie vie?
Andrée Chédid
00:00 Publié dans Poèmes | Lien permanent | Commentaires (1)
24/05/2022
La lettre
Elle vient subrepticement, se pose
Neigeuse colombe
Sur la table d’écoute
Où palpitent d’invisibles murmures
Elle voudrait te tenir aux abords
De la merveille
Mais ajuste distance
Entre toi et sa déchirure
L’ouvrant
Tu portes les mots à tes yeux
Jusqu’à en oublier le tard
Et les calligraphies des ombres sur le mur
Tu lis
Au plus creux de tes jours
L’éternité
Trop courte pour l’étonnement.
Là-bas, de l’autre côté des vents
Il fait immensément calme
Hors du temps
Où les ombres n’assiègent plus
Où la mort n’atteint pas
Cette aube du regard hier recru de larmes
Ce hautbois
Ce chant détaché de sa branche
Ces cristaux de neige
La brume fibre à fibre se déchire
En volutes d’encens
S’élève des étangs
Chaque instant lesté d’éternel
Nous jubilons dans l’assemblée des arbres.
Gilles Baudry
21:00 Publié dans Poèmes | Lien permanent | Commentaires (0)