14/10/2016
Prière de l'artiste et de l'artisan
Apprends-moi, Seigneur, à bien user du temps que tu me donnes pour travailler, à bien l'employer sans rien en perdre.
Apprends-moi à tirer profit des erreurs passées sans tomber dans le scrupule qui ronge.
Apprends-moi à prévoir le plan sans me tourmenter, à imaginer l’œuvre sans me désoler si elle jaillit autrement.
Apprends-moi à unir la hâte et la lenteur, la sérénité et la ferveur, le zèle et la paix.
Aide-moi au départ de l'ouvrage, là où je suis le plus faible.
Aide-moi au cœur du labeur à tenir serré le fil de l'attention.
Et surtout comble Toi-même les vides de mon œuvre, Seigneur!
Dans tout le labeur de mes mains laisse une grâce de Toi pour parler aux autres et un défaut de moi pour me parler à moi-même.
Garde en moi l'espérance de la perfection, sans quoi je perdrais cœur. Garde-moi dans l'impuissance de la perfection, sans quoi je me perdrais d'orgueil.
Purifie mon regard: quand je fais mal, il n'est pas sûr que ce soit mal, et quand je fais bien, il n'est pas sur que ce soit bien.
Seigneur, ne me laisse jamais oublier que tout savoir est vain sauf là où il y a du travail, et que tout travail est vide sauf là où il y a amour, et que tout amour est creux qui ne me lie à moi-même et aux autres et à Toi, Seigneur!
Enseigne-moi à prier avec mes mains, mes bras et toutes mes forces.
Rappelle-moi que l'ouvrage de mes mains t'appartient et qu'il m'appartient de te le rendre en le donnant ; que si je le fais par goût du profit, comme un fruit oublié je pourrirai à l'automne ; que si je le fais pour plaire aux autres comme la fleur de l'herbe je fanerai au soir ; mais si je le fais pour l'amour du bien, je demeurerai dans le bien ; et le temps de faire bien et à ta gloire, c'est tout de suite, Amen!
Prière des copistes et enlumineurs du haut moyen âge, sans doute d'origine anglaise.
in "Naissance et splendeurs du manuscrit monastique du VII' au XII' siècle", Gilberte Garrigou
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06/10/2016
La parole poétique
Comme le symbole, la poésie fait signe, suggère la richesse profuse d'un « invisible » sans lequel le visible bascule dans le morne ennui de la platitude. Elle donne à penser, à rêver, à méditer en ouvrant le lecteur aux perspectives de sa vocation spirituelle, au sens le plus large du mot. Car l'homme, dit fortement Pierre Emmanuel, est « la seule créature qui ne soit pas seulement une créature » mais une aspiration à l'Être.
En cela, la poésie fait figure d'oxygène indispensable sinon vital. « Envole-toi bien loin de ces miasmes morbides », conseille Baudelaire qui poursuit : « Derrière les ennuis et les vastes chagrins/Qui chargent de leur poids l'existence brumeuse/Heureux celui qui peut d'une aile vigoureuse/S'élancer vers les champs lumineux et sereins. »
Se souvenir d'Yves Bonnefoy
C'est à la portée de tous à condition de se défaire de soi, de s'abandonner à la grâce du Cimetière marin de Valéry : « Ce toit tranquille, où marchent des colombes. Entre les pins palpite, entre les tombes… » ou des Yeux d'Elsa d'Aragon : « Tes yeux sont si profonds qu'en se penchant pour boire/J'ai vu tous les soleils y venir se mirer… » Ou bien encore ce si sobre « Le feu est clair, la table mise, le vin brille dans les carafes » de Bonnefoy. Il irradie.
Dans ses nombreuses conférences, Bonnefoy n'a cessé d'insister sur le grave préjudice causé à la poésie par l'invasion des images qui finissent par stériliser la capacité d'imaginer. Puisque ces images toutes faites nous sont offertes sans compter, à quoi bon s'astreindre à ce joyeux effort de la lecture dont porte témoignage Le cercle des poètes disparus ?
Mais justement, est-il si joyeux après une scolarité où trop souvent, à l'écoute attentive, respectueuse et fervente du poème et de sa musique est substitué un écorché comme on le fait des grenouilles sur la paillasse, un dépeçage apparenté à une opération de conquête, de prise de possession guère éloignée du viol. D'où le conseil de « ne pas trop céder à la tentation de faire des analyses textuelles » pour savourer le suc de la « parole » dès lors apprise… « par cœur ». Que dirait-on d'un enseignement musical limité aux cours de solfège ?
Se mettre dans l'« état de poésie » (Georges Haldas), c'est s'ouvrir à la profondeur des choses pour communiquer avec le « sens fondamental de la vie ». Mais cela suppose une disposition devenue de plus en plus rare à faire silence, à entrer en silence et à se donner la possibilité d'« entendre dans chaque mot un silence qui est, en dessin, l'équivalent de la non-couleur, du vide ». De l'importance, comme le dit dans un clin d'œil le poète breton Gilles Baudry, de « laisser au silence… le dernier mot ».
Jacques Le Goff, professeur émérite des universités
Ouest-France du 24 août 2016?
Source et texte complet ICI
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05/10/2016
La page blanche
La page blanche fait peur. Elle fait pâlir. Elle est l’angoisse de l’écrivain et du poète comme celle de l’élève en panne sèche au début d’un devoir. Elle est inquiétante, redoutable, vertigineuse. Elle est un miroir sans tain, un puits tari, une nappe sans pain ni raisin.
Elle est pourtant l’outil du poète, la pauvreté de ses moyens avec son frère le crayon à la fois pinceau chatoyant et arme de combat. Moins onéreuse que la toile du peintre, moins coûteuse que le piano du musicien compositeur, moins chère que tous les artifices des faiseurs de rêves et des magiciens de music-hall.
Le poète face à la page blanche est seul devant le néant. Il a tout à créer comme au matin du monde, tout à fleurir pour de belles récréations, tout à donner quand le vent la fera s’envoler, tourner et retourner sous des yeux affamés de lumière, avides d’éternité.
Le poète pose un mot, puis deux et quelques autres. La page, visage livide sans regard, s’illumine timidement, car toutes les étincelles n’allument pas un feu. Il faut parfois se frotter au silex du silence, laisser crisser quelques sentiments d’inquiétude, laisser sécher quelques bois impurs. Mais quand le feu prend, c’est d’abord un petit brasier consolant, de petits crépitements de joie secrète, une saine et sainte satisfaction naissante comme une promesse chargée d’immenses paradis. Puis c’est l’incendie, celui qui ne brûle pas, le buisson ardent derrière lequel Dieu se cache. La muse s’amuse mais Dieu diffuse dans cette création sa présence silencieuse.
Puis le poète efface. La gomme est son outil préféré. Aucune rature ne doit devenir un mot et aucun mot une rature. Tout doit être pur, aussi blanc que la page au commencement, pour que ressuscite dans la lumière pascale une création trop longtemps enfouie dans la nuit, pour que se purifient toutes les scories du langage à l’eau d’une fontaine ouverte et généreuse, pour que s’allument les millions d’étoiles du ciel au feu qui donne jour à la vie.
Et lorsque la gomme efface davantage que le crayon n’écrit, la page se retrouve aussi blanche qu’au commencement. Et ce n’est pas dans le néant et sa torpeur que le poète va se jeter mais dans le royaume où les mots sont devenus transparents, le royaume où le poète lui-même va s’effacer devant la présence du seul Poète nommé d’un mot qu’on ne devrait jamais écrire ni prononcé : Dieu.
TP
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01/10/2016
Jésus seul
Jésus seul - Natasha st Pier et Gregory turpin
Poème de Ste Thérèse de Lisieux dont c'est la fête aujourd'hui.
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28/09/2016
Tu crois en moi
Grégory Turpin: Tu crois en moi (2016)
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23/09/2016
Seule la paix est sainte
« Nos traditions religieuses sont diverses. Mais la différence n’est pas pour nous un motif de conflit, de polémique ou de froide distance. Nous n’avons pas prié aujourd’hui les uns contre les autres, comme c’est malheureusement arrivé parfois dans l’histoire. Sans syncrétisme et sans relativisme, nous avons en revanche prié les uns à côté des autres, les uns pour les autres. (…) En poursuivant le chemin commencé il y a trente ans à Assise (…) « nous affirmons ensemble que celui qui utilise la religion pour fomenter la violence en contredit l’inspiration la plus authentique et la plus profonde » (Jean-Paul II, Assise, 2002), qu’aucune forme de violence ne représente « la vraie nature de la religion. Elle en est au contraire son travestissement et contribue à sa destruction » (Benoît XVI, Assise, 2011). Ne nous lassons pas de répéter que jamais le nom de Dieu ne peut justifier la violence. Seule la paix est sainte, pas la guerre !
Pape François à Assise le 20 septembre 2016
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