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14/03/2009

Qui lit la poésie aujourd'hui?

Par eric dubois (Écrivain)

Qui lit de la poésie aujourd’hui? Personne ou presque, une poignée d’individus passionnés, souvent poètes eux-même. C'est le Printemps des Poètes 2008 et les médias vont encore donner une vision arbitraire de la poésie contemporaine, en soulignant l’importance «médiatique» du Slam, au moment où sort le deuxième album de Grand Corps Malade, en évoquant quelques poètes célèbres comme Philippe Jaccottet, Yves Bonnefoy ou Bernard Noël, entre autres, qui écrivent et publient depuis très longtemps et qui sont heureusement soutenus par de grands éditeurs. Mais est-ce que le Grand Public les connait?

Faites un sondage dans la rue et posez la question suivante: citez-moi un poète contemporain vivant? On vous répondra par des noms de disparus: Prévert, Aragon ou Eluard, dans le meilleur des cas et on ne saura pas répondre exactement à votre question. Mais qui connait Ariane Dreyfus ou Jacques Ancet? Mais quid de tous les milliers de poètes de France et de Navarre, qui n’ont pas de lecteurs parce que les grands médias ne s’intéressent pas à la poésie, de toutes ces revues menacées de disparaitre, parce que les institutions ont décidé de baisser ou bien de supprimer les subventions? Cela touche même les «poètes célèbres et soutenus par de grands éditeurs».

«Aujourd’hui Poème» est en passe de mourir. «Le Nouveau Recueil» n’existe plus sur support papier et survit grâce au Net. Des revues d’importance moyenne, des revues plus petites encore, des maisons d’édition avec des auteurs moins prestigieux mais tout aussi talentueux, disparaissent, des associations n’ont plus le droit de tenir un stand au Marché de la Poésie, Place St Sulpice, à Paris, en Juin, par faute de non-rentabilité: voilà ce qu’est la poésie aujourd’hui! Depuis 2007, des associations comme le Club de Poètes de Champigny sur Marne (Médiathèque Jean-Jacques Rousseau) regroupant des amateurs de poésie, des enseignants ou des professionnels de la culture comme les bibliothécaires ne peuvent plus demander un stand alors qu’elles ont les moyens de le payer! Au Marché de la Poésie, il n'y a plus que des éditeurs et certaines revues (ce qui est normal pour un Marché), mais plus d'associations!!!

La Poésie en France? Elle est moribonde! Et le Slam est un écran de fumée qui cache l’essentiel.

Je soutiens évidemment toutes les manifestations du Printemps des Poètes mais je pense qu’il faut être vigilant et surtout s’inquiéter de la disparition de certaines revues et de certains éditeurs.

Vu dans Blibliobs

10/03/2009

Petit poème


Les frères Taloche - petit poème

08:00 Publié dans Humour, Poèmes | Lien permanent | Commentaires (0)

09/03/2009

Le hareng saur

cros.jpg

Le hareng saur

A Guy.

Il était un grand mur blanc - nu, nu, nu,
Contre le mur une échelle - haute, haute, haute,
Et, par terre, un hareng saur - sec, sec, sec.

Il vient, tenant dans ses mains - sales, sales, sales,
Un marteau lourd, un grand clou - pointu, pointu, pointu,
Un peloton de ficelle - gros, gros, gros.

Alors il monte à l'échelle - haute, haute, haute,
Et plante le clou pointu - toc, toc, toc,
Tout en haut du grand mur blanc - nu, nu, nu.

Il laisse aller le marteau - qui tombe, qui tombe, qui tombe,
Attache au clou la ficelle - longue, longue, longue,
Et, au bout, le hareng saur - sec, sec, sec.

Il redescend de l'échelle - haute, haute, haute,
L'emporte avec le marteau - lourd, lourd, lourd,
Et puis, il s'en va ailleurs - loin, loin, loin.

Et, depuis, le hareng saur - sec, sec, sec,
Au bout de cette ficelle - longue, longue, longue,
Très lentement se balance - toujours, toujours, toujours.

J'ai composé cette histoire - simple, simple, simple,
Pour mettre en fureur les gens - graves, graves, graves,
Et amuser les enfants - petits, petits, petits.

Charles Cros (1842-1888) dans "Le coffret de santal"

17:00 Publié dans Poèmes | Lien permanent | Commentaires (0)

08/03/2009

Poème de femme

8 mars: Journée de la femme en cette semaine de la poésie

colette2.jpg
Flux et reflux


Quelle est ton heure de fête, ton heure de gloire, d’aise à vivre et à chanter ?
Est-ce à la fine pointe du jour, quand basculent les ténèbres et que toute chose émerge comme au premier matin ?
Est-ce la jubilation de l’éveil : je suis vivant ! cri du corps au mode ; j’existe dans cet univers à créer !
Et montent vers toi les odeurs familières, les mille bruits du quotidien, et tu touches le drape, la joue,
le mur, comme s’ils étaient miraculeux.
Est-ce la première rencontre, le premier visage ou la première main allant vers ton visage,
ta main ; le choc du regard, sa trouée ?
Est-ce dans le nid de la matinée, quand tu épouses le travail à plein corps ?
Est-ce à la césure de midi, lorsque s’équilibrent passé et futur, comme une certitude et une promesse ?
Est-ce dans le feu de l’après-midi, quand s’adoucit l’éclat des heures.
Ou bien le soir glissant vers la nuit, sa tendresse complice, son chuchotement heureux de retrouvailles sans faille, sa plénitude ?
Pour te connaître, te reconnaître, il me faut entrer dans ta perte et ton excès, tes deuils et tes fêtes

Colette Nys-Mazure

08:00 Publié dans Poèmes | Lien permanent | Commentaires (0)

06/03/2009

La môme néant

tardieu.jpg

La môme néant


Quoi qu'a dit ? - A dit rin.
Quoi qu'a fait ? - A fait rin.
A quoi qu'a pense ? - A pense à rin.

Pourquoi qu'a dit rin ?
Pourquoi qu'a fait rin ?
Pourquoi qu'a pense à rin ?

- A' xiste pas.

Jean Tardieu dans "Monsieur, monsieur" 1951

08:00 Publié dans Poèmes | Lien permanent | Commentaires (0)

05/03/2009

Trois poèmes de...

Trois poèmes de Raymond Queneau:

queneau.jpg

Un poème

Bien placés bien choisis
quelques mots font une poésie
les mots il suffit qu’on les aime
pour écrire un poème
on ne sait pas toujours ce qu’on dit
lorsque naît la poésie
faut ensuite rechercher le thème
pour intituler le poème
mais d’autres fois on pleure on rit
en écrivant la poésie
ça a toujours kékchose d’extrème
un poème

 

Pour un art poétique

Prenez un mot prenez en deux
faites les cuir' comme des oeufs
prenez un petit bout de sens
puis un grand morceau d'innocence
faites chauffer à petit feu
au petit feu de la technique
versez la sauce énigmatique
saupoudrez de quelques étoiles
poivrez et mettez les voiles
Où voulez vous donc en venir ?
A écrire Vraiment ? A écrire ?

 

L’inspiration

De son juchoir
la poule laisse choir
un oeuf
c’est une imprudence
un moment d’absence
mais il tombe pouf
dans la paille :
la fermière était prévoyante
combien de poèmes brisés
que ne recueille aucun recueil.

08:00 Publié dans Poèmes | Lien permanent | Commentaires (0)