21/10/2011
Tu me proposes, fenêtre étrange ...
Tu me proposes, fenêtre étrange, d'attendre ;
déjà presque bouge ton rideau beige.
Devrais-je, ô fenêtre, à ton invite me rendre ?
Ou me défendre, fenêtre ? Qui attendrais-je ?
Ne suis-je intact, avec cette vie qui écoute,
avec ce coeur tout plein que la perte complète ?
Avec cette route qui passe devant, et le doute
que tu puisses donner ce trop dont le rêve m'arrête ?
Rainer Maria RILKE
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20/10/2011
Le brouillard
Le brouillard
Le brouillard a tout mis
Dans son sac de coton ;
Le brouillard a tout pris
Autour de ma maison.
Plus de fleurs au jardin,
Plus d'arbres dans l'allée ;
La serre des voisins
Semble s'être envolée.
Et je ne sais vraiment
Où peut s'être posé
Le moineau que j'entends
Si tristement crier.
Maurice CARÊME (1899 - 1978)
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19/10/2011
La danse de la terre
Wanir Wélépane est un poète et homme d'église (pasteur) calédonien kanak, né en 1941. Son prénom "Wanir" signifie "petite lumière" en kanak.
Il est l'auteur du recueil de textes multilingues "Aux vents des îles", accompagnés de photographies de Marie-Jacqueline Begueu (édité par l'Agence de développement de la culture kanak en 1993).
Kwènyii
Wêê
Numèè
Caac
Le mât est planté sur la terre
Dans l'aire de danse
Pour annoncer au peuple la danse sacrée
Prenez vos conques
Soufflez sur les montagnes
Soufflez sur les airs
Soufflez dans les forêts
Et dans les vallées
Pour appeler tout le monde
A danser la danse de la terre.
Wanir Wélépane, (texte emprunté à l'anthologie "Le français est un poème qui voyage" - Éditions Rue du Monde, 2006)
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16/10/2011
Homme
HOMME
Tu as jeté au loin ta peau de bête originelle,
Tu as arraché tes mains de la terre
Et les as lancées vers le ciel.
Tu t’es élevé et sur ta tête fière
Sur ton front s’est versé le soleil.
Tes doigts agiles ont ensorcelé la pierre,
Le bois et les métaux et l’onde claire,
Tu as dompté le vent sauvage,
Et asservi le feu que tu as rendu sage.
La matière devenue machine et, à ton gré,
A travaillé, couru et traversé l’espace
En hurlant ta puissance à la face
du Monde émerveillé,
Tu as donné la mort, tu as donné la vie,
De ton souffle la Gloire a jailli.
Quand ta voix rauque a appelé l’amour,
Elle s’est fondue en une douce mélodie
Sur les champs et les fleurs alentour.
Les battements de ton cœur résonnent
dans les roseaux sous la lune claire,
Tu entends leurs douces homélies,
Devant toi le monde s’éclaire
Mais ton âme garde en son sein ton envie,
Un règne sans limite, majestueux, sans voile,
Telle une immensité enceinte d’une étoile.
Contemplant ton œuvre du sommet de Babylone,
Tu défies le Ciel, en lui lançant, arrogant, ton nom: HOMME !
Ö, combien j’ allumerais, au sommet des montagnes
De grands feux de joies,
je carillonnerais mille et mille fois,
à travers l’espace tes louanges,
Je te porterais sur mon dos jusqu’à l’apothéose,
Je serais ton adorateur, et danserait jusqu’à l’osmose
En d’éternelles danses bachiques et étranges.
Ö Frère, cher et aimé
Ô Frère pitoyable,
Ô Frère haïssable,
Ô Frère mille fois pleuré,
Nourri de l’essence de mon cœur,
Ma honte et ma douleur : HOMME !
Las ! L’hymne glorieux se délite, et saigne
Les feux de joie s’endorment sous les cieux
Leur fumée brûlent tes yeux,
Les cloches s’éteignent
Les fleurs, trempées dans le venin
Sa fanent, merveilles sans lendemain.
Que reste-t-il à admirer ?
La beauté du geste qui tue ?
Qui adorer ?
L’Ange déchu ?
Que chanter ?
Des plaintes et gémissements dans l’ombre?
Que danser ?
Le bal de la mort sur les décombres? .
Pourquoi même parler ? Tu le sais bien, l’horreur
Des mots blesseraient l’orateur.
Las, tout est vain !
La seule voie pour fuir ton erreur
Est de partir, sans fin,
Loin de toi, se réfugier dans les yeux innocents
Des animaux fidèles, dans la douce ramure s’élançant
Vers le ciel immense, puis, sans repère,
Et enfin te terrer dans le tragique silence de la pierre..
Koloman KALOCSAY, poète d'Océanie
( traduction de l'esperanto de L. SCHUELLER-LEROY et Pierre HUMBERT )
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13/10/2011
Lumières d'Hommes
Somnambule en plein midi
même la viande sur la fourchette
même la fourchette à la main
toujours très près des camarades
mais si loin tout de même si loin
et donner la pâtée au chien
mais je voyais la pâtée s’enfuir
le chien courir le long du mur
et j’entendais ses soupirs
et le chien voyait ma lumière
mon astre
et laissait la pâtée courir
j’avais cette lumière là sur moi
comme ça
mais ce n’était pas
ma lumière
elle était là comme ça
j’aurais voulu
j’ai tout essayé
j’aurais voulu m’en débarrasser… partager
mais elle brûlait tout le monde
personne n’en voulait
mais
si je la mettais en veilleuse
tout le monde applaudissait
lumière couleur de lanterne sourde
petite lampe sans danger
elle plaisait
mais la grande lueur de l’indifférence avouée
le vrai lampadaire
le bec de gaz saignant
contre lequel l’amour saignant se cogne
se blesse
se tue
sans vraiment mourir
la comète
le grand rat de cave que chacun porte dans sa poitrine
l’inquiétante et magnifique lueur
cette braise
personne presque personne n’en veut
petits mensonges lumineux couleur de vérité lumineuse
vérités verroteries
lumière béate de l’homme franc qui vous regarde bien en face
salamandre installée dans le front du penseur
bois et charbons
petits briquets de l’amitié
feux de paille
feux de poutres
feux de joies
de Bengale et de tous bois
allumettes
brindilles
boulets bernots
comme vous plaisez !
ne croyez pas que je pousse le cri du ver luisant qui s’excuse de briller
ou la plainte déchirante du cul-de-jatte qui voudrait patiner
non…
je hurle à la lumière avec de l’encre et du papier
le soir tard
et je crie
tout de même
il y a la lumière
chacun a sa lumière
et le monde crève de froid
le monde a peur de se brûler les doigts
évidemment
c’est la lumière qui brille qui brûle qui fait cuire
et qui glace le sang
c’est la grande omelette surprise
le soleil avec des caillots de sang
lueur du coeur
lueur de l’amour
lueur
oh il faut la poursuivre cette lueur aveuglante
elle existe
elle crève les yeux
mais s’ils faut que les yeux crèvent pour tout voir
crevez les yeux
c’est la lumière vivante que chacun porte en soi
et que tout le monde étouffe pour faire comme tout le monde
lumière défendue
tu grilles ceux qui t’approchent
ceux qui veulent te prendre
mais tu les aimes
lumière vivante
la vie c’est toi
la vie vivante qui marche en avant
en revenant sur ses pas
qui marche tout droit qui fait des détours et qui n’en fait pas
soleil de nuit
lune de jour
étoiles de l’après-midi
battements de coeur avant l’amour
pendant l’amour
après l’amour
grande lumière dans l’oeil du porc qui fait l’amour
lumière telle que sans abat-jour
lumière brute lumière rouge
lumière crépusculaire
indifférente avide passionnée
lumière de printemps si douce
lumière d’enfant
toujours la même lumière cruelle et lucide
mais parfois si belle
visages qui vous approchez
yeux fermés
bouches ouvertes
tout tourne et tout flambe
vos deux têtes
tête de garçon
tête de fille
vos deux têtes tournent et oublient…
c’est un astre
un instant
une victoire
une prise
éclair obscur du mauvais temps
feux follets de la morale
croix de feu
pétards mouillés
ciboires bien astiqués
malheureux petits soleils de cuivre
ostensoirs
comme ils sont ridicules et blêmes vos rayons
lorsque la lumière de celle qui aime l’amour
rencontre la lumière de celui qui aime l’amour
drôle d’incendie
peu importe sa durée
toujours hier demain bonjour bonsoir autrefois jamais toujours et vous-mêmes
qu’est-ce que ça fout pourvu que ça flambe.
Jacques Prévert - "Soleil de nuit"
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04/10/2011
Cantique des créatures
Seigneur, toi qui es Bon, Très-Haut et Tout-Puissant, à toi la louange, la gloire, l'honneur et toute bénédiction. A toi seul ils reviennent, ô Très-Haut, et personne ne peut dire tout ton mystère !
Loué sois-tu, Seigneur, pour toutes tes créatures, spécialement pour le Soleil, notre grand frère. Il fait le jour et par lui, tu nous illumines. Il est si beau et si rayonnant. De toi, Très-Haut, il est un magnifique reflet !
Loué sois-tu, Seigneur, pour notre sœur la Lune et pour les Etoiles. Dans le ciel tu les as façonnées, si claires, si précieuses et si belles !
Loué sois-tu, Seigneur, pour notre frère le Vent, et pour l'air et pour les nuages, pour le ciel paisible et pour tous les temps: par eux, tu réconfortes tes créatures !
Loué sois-tu, Seigneur, pour notre sœur l'Eau, qui est si utile et si modeste, si précieuse et si pure !
Loué sois-tu, Seigneur, pour notre frère le Feu, par lui, tu éclaires la nuit. Il est si beau et si joyeux, si indomptable et si fort !
Loué sois-tu, Seigneur, pour notre mère la Terre qui nous porte et nous nourrit. Elle produit la diversité des fruits et les herbes et les fleurs de toutes les couleurs !
Loué sois-tu, Seigneur, pour ceux qui pardonnent par amour pour toi et qui supportent les épreuves et les maladies: heureux s'ils demeurent dans la paix, car par toi, Très-Haut, ils seront récompensés !
Loué sois-tu, Seigneur, pour notre sœur la Mort que personne ne peut éviter. Quel malheur pour ceux qui meurent avec un cœur mauvais ! Mais quel bonheur pour ceux qu'elle surprendra avec un cœur bon car le paradis les attend auprès de Toi !
Louez et bénissez avec moi le Seigneur, rendez-lui grâce et servez-le avec beaucoup d'humilité !
Auteur:Saint François d'Assise
Né à Assise (en Italie) en 1181 ou 1182, d'où l'appellation "François d'Assise".
Mort à Saint Damien le 3 octobre 1226. Il avait 45 ans. Fête: le 4 octobre.
NOTE: Au terme de sa vie, Saint François rédige ce qu'on appelle le "Cantique du frère Soleil" qui est l'aboutissement de ses enseignements sur le respect et l'amour que tous les humains doivent porter envers toutes les créatures de Dieu. Il rejoint ainsi les préoccupations de ceux et celles qui se soucient de la défense de la nature, des animaux et de l'environnement. C'est d'ailleurs pourquoi, en 1979, il est proclamé "patron des écologistes".
Les enfants sont très sensibles à la beauté duCantique du frère Soleil
, où les éléments de la nature sont appelés nos frères et nos soeurs. Ce cantique est une école de prière en lui-même. Les couples et familles sont invités à le reprendre ensemble dans la nature, en vacances, en auto, partout et en toute occasion.
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